Suivez-moi sur
Groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Écologiste

Prise en compte de la qualité de vie étudiante

Proposition de résolution - Séance publique du 4 janvier 2022


Madame/Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Chers collègues,


La présente proposition porte dans l’hémicycle l’essentiel des conclusions du rapport sur les conditions de la vie étudiante, dont le Président Laurent Lafon était le rapporteur et qui a été voté à l’unanimité en juillet 2021. Elle est symboliquement cosignée par tous les membres du bureau de la mission d’information, et donc par tous les groupes politiques du Sénat, afin de montrer sa continuité avec ce travail collectif et d’exprimer notre accord avec son bilan et ses préconisations. Je remercie le président Laurent Lafon et le groupe de l’Union centriste de nous permettre d’en discuter en l’inscrivant à l’ordre du jour du Sénat.


Nul ne peut plus ignorer la profonde dégradation de la condition de vie des étudiants tant notre pays a été heurté et meurtri par les images de ces jeunes réduits à trouver leur pitance auprès des banques alimentaires. La crise sanitaire n’a été que l’acmé d’une lente déliquescence de leurs moyens de se nourrir, de se loger, de se soigner et finalement d’étudier. Car les politiques publiques mises en œuvre depuis au moins deux décennies avaient oublié l’essentiel que rappelle justement et simplement cette proposition : il n’est pas possible d’apprendre le ventre vide, d’apprendre dans la promiscuité d’un logement trop petit, d’apprendre avec une vue mal corrigée, d’apprendre avec un mal de dent qui n’est pas soigné, d’apprendre avec la peur de perdre son emploi précaire quand il apporte tout le revenu.


Les étudiants ne sont pas des cerveaux dans lesquels des connaissances sont déversées et que l’on stimule en donnant l’illusion qu’il participe à une compétition internationale dont les règles les ignorent. Le classement de Shanghai est moins efficace que les Restaurants du cœur pour secourir les étudiants ! Notre résolution relève une évidence coupablement négligée, l’accompagnement personnalisé des étudiants dans toutes leurs activités matérielles est une condition essentielle de leur réussite académique.


Notre mission d’information a eu la surprise de constater, à ce titre, que ce sont souvent les petits établissements, éloignés des grandes métropoles qui ont réussi à proposer aux étudiants les dispositifs d’accompagnement les plus efficaces. Ce résultat est obtenu par la mobilisation exceptionnelle de toutes leurs équipes au service de la réussite des étudiants. Je prends une nouvelle fois l’exemple de l’institut national universitaire Champollion d’Albi. Son succès est double. Il offre un cursus universitaire à des jeunes issus de la ruralité qui n’auraient eu ni les moyens financiers, ni la volonté de s’inscrire dans une université de taille supérieure et il arrive à les conduire jusqu’à la fin de la licence par un suivi individuel de grande qualité. Son taux de réussite est ainsi un des meilleurs de France. Ce travail profite aux étudiants, mais aussi à leurs territoires.


Il est donc regrettable que cette excellence républicaine, qui vise la promotion des individus et des collectivités dans lesquelles ils vivent, ne soit pas mieux aidée et valoriser. A contrario, cet exemple vertueux démontre que l’échec en licence n’est pas une fatalité et qu’il est possible de le résorber par des politiques volontaristes adaptées à chaque situation.


Affirmons-le avec force, il y a une solution budgétaire et donc politique à la réussite estudiantine. L’origine des difficultés profondes dont souffrent les universités est unanimement reconnue, c’est le sous-investissement chronique. Le Conseil d’analyse économique, organisme placé auprès du premier ministre, et la Cour des comptes viennent très récemment de l’analyser sans contredit. Je ne retiens que deux chiffres de ces bilans affligeants. Ainsi, la dépense intérieure par étudiant baisse inexorablement depuis plus de dix ans et, durant la même période, les effectifs étudiants ont augmenté de 20 % alors que le nombre d’enseignants diminuait de 2 %.


Le Conseil d’analyse économique considère que cette dépression budgétaire a des conséquences économiques néfastes sur le marché du travail, la productivité, et l’innovation, mais aussi sur la cohésion sociale, car l’université est incapable de corriger les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur. Il estime qu’il faudrait consacrer entre cinq et huit milliards d’euros supplémentaires pour remettre à flot le système universitaire.


C’est beaucoup d’argent, mais finalement si peu pour donner à notre jeunesse des raisons d’espérer dans son avenir et à notre pays une voie pour surmonter les épreuves à venir par l’investissement dans la connaissance et par l’engagement républicain renouvelé en faveur de l’émancipation humaine.